CFRP – En Europe, les gouvernements, les usines et les entreprises s’évertue à faire face à une crise énergétique. En effet, la diminution des livraisons du gaz naturel de la Russie fait monter les prix en flèche, déclenchant une crise économique brutale qui a mis à l’épreuve la solidarité européenne face à la guerre de la Russie en Ukraine.
Juste après l’annonce de la Russie concernant l’arrêt des livraisons du gaz à compter du 31 août dernier, les prix du gaz sur les marchés mondiaux ont augmenté de 30 %, soit une hausse de 400 % par rapport à l’année précédente.
Les pays occidentaux craignent que Moscou n’augmente délibérément les prix du gaz pour tenter d’affaiblir les pays qui s’opposent à l’invasion de l’Ukraine, une tactique que le président ukrainien Volodymyr Zelensky a qualifiée de «terrorisme économique».
La ministre française de la Transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher, a déclaré que la France s’était préparée au scénario d’une nouvelle diminution des approvisionnements en gaz russe, après que le géant énergétique russe Gazprom a annoncé qu’il suspendait entièrement ses livraisons à Engie.
« La Russie utilise le gaz comme une arme de guerre et prend prétexte de l’application des contrats par Engie pour réduire encore davantage les approvisionnements français qui avaient déjà drastiquement baissé », a-t-elle dit dans un communiqué.
« La Russie utilise le gaz comme une arme de guerre et prend prétexte de l’application des contrats par Engie pour réduire encore davantage les approvisionnements français qui avaient déjà drastiquement baissé »
Cela a été confirmé par la Présidente de la Commission européenne qui a accusé le président russe Vladimir Poutine de se servir de l’énergie « comme d’une arme » en coupant l’approvisionnement et en manipulant les marchés.
Alors que Moscou s’attend à ce que l’Europe se retrouve face à une véritable catastrophe énergétique sans gaz russe, comment le vieux continent va-t-il surmonter cette crise avec le minimum de pertes ?
Les réserves de gaz de l’Europe
Les gouvernements européens tentent de coordonner une réponse à la hausse des coûts de l’énergie pour les entreprises et les ménages et de remplir les installations de stockage avant le pic de la demande hivernale.
L’Union européenne a annoncé avoir atteint l’objectif de stocker 80 % de ses besoins en gaz début septembre, et que le stockage continuerait pour atteindre 90 % en novembre prochain.
Le taux de stockage dans nombre de pays européens a dépassé 80 % et approchait 90 %, à l’instar de la France, de l’Italie, de l’Allemagne, de la Pologne, du Danemark, de la République tchèque, de l’Espagne et de la Suède.
Certains pays d’Europe de l’Est sont loin de cet objectif, comme la Lettonie qui n’a pas dépassé 65%, idem en Autriche et en Hongrie.
Cependant, tous les regards restent braqués sur l’Allemagne en tant que première économie d’Europe, malgré son stockage de 84 % du gaz, elle aura besoin du soutien d’autres pays européens, de même qu’il est attendu que la France joue ce rôle car Paris ne souffre pas d’une pénurie de gaz.
Alternatives envisagées pour se passer du gaz russe:
Le plan de la Commission européenne pour compenser le gaz russe porte sur trois axes principaux. Le premier est le « Corridor gazier sud », qui passe par l’Azerbaïdjan, la Géorgie, la Turquie, la Grèce, la Bulgarie, l’Albanie et la Mer Adriatique. Ce gaz devrait être acheminé vers l’Italie via des pipelines de plus de 3 500 km.
Selon les données de la Commission européenne, ce gazoduc a déjà commencé à pomper 10 milliards de mètres cubes de gaz vers l’Europe, et il devrait atteindre son plafond (10,5 milliards de mètres cubes de gaz) d’ici la fin de 2022. l’Europe de l’Est est le premier bénéficiaire de ce pipeline.
Deuxième alternative : Elle consiste à compter sur la Méditerranée comme plate-forme pour que le gaz atteigne l’Europe. A ce propos, la Commission européenne évoque l’Algérie, l’Égypte et Chypre, pour fournir du gaz soit par des gazoducs, soit en important du gaz naturel liquéfié.
Troisième alternative : il s’agit de l’importation et du stockage de gaz naturel liquéfié. La Commission européenne identifie trois sources principales, à savoir les États-Unis, le Qatar et l’Afrique de l’Est.
L’Allemagne a annoncé la construction de 3 stations flottantes de stockage de gaz, outre le recours de nouveau à l’énergie nucléaire. Berlin a décidé de retourner sur la fermeture de 3 centrales nucléaires.
Selon le « Washington Post », l’Allemagne a commencé à réparer les mines de charbon et les centrales électriques qui ont été fermées il y a 10 ans dans le pays. Berlin devrait consommer plus de 100.000 tonnes de charbon par mois renonçant à son engagement à décarboniser le pays définitivement d’ici 2038. D’autres pays européens comme l’Autriche, la Pologne, les Pays-Bas et la Grèce ont également commencé à redémarrer des centrales au charbon.
Comment les pays européens vont-ils faire face à la hausse des prix du gaz?
L’Union européenne tient des débats autour de la manière de surmonter la crise énergétique résultant de la guerre de la Russie contre l’Ukraine. Les prix de l’énergie augmentent dans l’Union européenne et ailleurs, alors que la Russie freine ses exportations de combustibles fossiles dans le but de faire pression sur le bloc pour qu’il réduise son soutien à l’Ukraine. Les prix du gaz sont maintenant environ dix fois supérieurs à la moyenne de la dernière décennie
En septembre 2022, la Commission européenne a proposé des mesures à l’échelle de l’UE contre la manipulation par la Russie du marché de l’énergie. Ils obligeront les entreprises et les particuliers à consommer moins d’énergie dans certaines circonstances. Egalement ils envisagent des frais inattendus sur certains groupes électrogènes, qui seront restituées aux consommateurs. Il s’agit d’octroyer une aide en liquidités aux compagnies énergétiques et propose un plafonnement du prix du gaz russe. Les ministres de l’énergie de l’UE ont discuté des idées le 9 septembre 2022, mais ils ne sont pas parvenus à une conclusion définitive.
L’Union européenne a élaboré un plan pour réduire la consommation de gaz de 15 % cet hiver et veiller à ce que ses réserves de gaz naturel soient remplies à 80 % d’ici le 1er novembre.
L’Allemagne, la France et l’Espagne ont établi des règles exigeant que les bâtiments publics aient une température maximale de 19 degrés Celsius en hiver. La France et l’Espagne ont également fixé la température minimale pour les climatiseurs dans les bâtiments publics, respectivement, à 26°C et 27°C.
Pour faire face à une offre réduite, des endroits comme l’Allemagne se préparent déjà à de nouvelles réductions et à un éventuel arrêt complet.
L’Allemagne fait des choses comme éteindre les lumières et les monuments publics à Berlin, où environ 200 monuments publics ne sont plus éclairés la nuit. Dans de nombreux centres de loisirs publics, la seule douche dont vous pouvez profiter est une douche froide car l’eau chaude n’est pas disponible
Les différents gouvernements de l’UE versent une subvention à leurs citoyens et entreprises. Ces pays sont, néanmoins, confrontés au dilemme d’équilibrer cette aide avec une augmentation des prix de l’énergie afin de décourager la consommation. Certains pays rouvrent des centrales électriques au charbon polluantes et ajournent les arrêts de centrales nucléaires.
Le gouvernement britannique a annoncé qu’il gèlerait tous les 3 mois la révision périodique des prix de l’énergie, qui entraîne une hausse des factures de gaz et d’électricité, tandis que la France a annoncé avoir dépensé 26 milliards de dollars pour épargner aux citoyens la hausse des prix du gaz depuis ledéclenchement de la guerre en Ukraine.
Quant à l’Allemagne, elle a alloué plus de 65 milliards de dollars pour soutenir les entreprises et les citoyens et les protéger de la flambée des prix du gaz et de l’énergie.
La Finlande a également annoncé avoir consacré 10 milliards de dollars pour soutenir les entreprises énergétiques et non pour augmenter les prix. La Suède a alloué 23 milliards de dollars dans le même but.
Les retombés économiques de l’arrêt du gaz russe
L’impact économique de la crise actuelle du gaz sera direct pendant l’hiver, car l’augmentation concomitante des prix du gaz pourrait entraîner une hausse de l’inflation d’environ 2 points de pourcentage en moyenne en 2022 et 2023, selon les dernières estimations.
Il est devenu presque certain que la zone euro et la Grande-Bretagne entreront dans un état de stagnation économique qui pourrait durer jusqu’à la fin de l’année dernière. Le taux d’inflation dans les pays européens devrait atteindre 9 %, soit 4 fois plus élevé que le taux fixé par la Banque Européenne.
Le Fonds monétaire international a annoncé que les quatre plus grandes économies de l’Union européenne – la France, l’Allemagne, l’Italie et l’Espagne – atteindraient un taux de croissance inférieur aux attentes au cours de l’année 2023, au cas où un état de récession ne serait pas enregistré.
Quant à la Grande-Bretagne, la Banque centrale a annoncé que le pays était déjà entré en récession et s’attendait à ce que le taux d’inflation atteigne 13 % d’ici la fin de 2022.
Cependant, certains de ces impacts peuvent être atténués en garantissant des approvisionnements et des sources d’énergie alternatives en encourageant les économies d’énergie et en protégeant les ménages vulnérables.
Une étude du centre de recherche « BRUEGEL », basé dans la capitale belge, Bruxelles, montre qu’il serait possible pour l’Europe de survivre au pire hiver depuis la Seconde Guerre mondiale. Cependant il y aura des impacts économiques évidents, où les gouvernements européens devront prendre des décisions difficiles. Selon la même étude, la seule alternative pour les pays européens de venir au bout de leur dépendance au gaz russe serait de réduire la consommation européenne de 10 à 15 %. Dans le cas allemand, la consommation de gaz devrait être réduite de 20 % au cours des six prochaines années pour surmonter cette crise.
Mais le problème de coordination entre les États membres de devient plus complexe lorsque on considère les complexités des différentes économies de l’UE, ainsi que les questions techniques et géopolitiques entourant la question de la substitution des exportations énergétiques russes.