Pensée depuis mai 2023, la baisse des effectifs des Éléments français au Sénégal (EFS) est en cours révèle Africa Intelligence.
La France réfléchit à la mise en place de nouveaux dispositifs de cogestion, en lien avec l’armée sénégalaise.
Du reste, au Sénégal, l’objectif est d’assurer l’application des accords de partenariats et des actions de coopération opérationnelle, par le biais d’instructions et d’entraînements dans sa zone de responsabilité permanente des 15 pays de la CEDEAO et en Mauritanie.
Parallèlement, le départ obligé et forcé des forces françaises du Niger marque assurément un changement d’époque dans les opérations militaires extérieures de la France.
C’est ainsi que la France entend privilégier dorénavant des partenariats militaires afin de faire en sorte que le contingent français ne soit plus en première ligne.
Paris entend assurément redéfinir la coopération.
Pour mémoire, Paris a signé une série d’accords bilatéraux de défense et d’assistance militaire signés avec ses anciennes colonies et jusqu’à 10 000 soldats stationnés ou participant à des opérations militaires dans ses anciennes colonies au cours des premières années suivant les indépendances des États respectifs.
De plus, Paris la France a réalisé la bagatelle d’au moins 30 interventions militaires directes en Afrique de l’Ouest comme en Afrique Centrale entre 1964 et 1995.
Dans ce cadre, la Paris a bel et bien poursuivi une politique de substitution, plutôt que de partenariat, avec les forces militaires africaines dans son pré-carré.
Qu’on y songe, après avoir quitté le Niger, l’armée française au Sahel ne sera plus présente qu’au Tchad, avec un contingent d’un millier d’hommes.
S’agissant des éléments français au Tchad (EFT) , « près d’un millier d’hommes, ont pour mission de garantir la protection des intérêts français et de ses ressortissants vivant dans le pays. Ils apportent également un soutien logistique et un appui aux renseignements aux forces armées tchadiennes, conformément à l’accord de coopération signé entre les deux pays », précise Tony Chafer, Professeur d’études africaines et françaises au Centre de recherche en études européennes et internationales à l’université de Portsmouth au Royaume-Uni.
En 2013, le dispositif Épervier comptait près de 950 militaires affectés à deux bases principales, la base aérienne 172 à Ndjamena et la base capitaine Croci à Abéché, dans l’Est du Tchad.
A Faya, dans le Nord du pays est stationné un détachement d’une cinquantaine d’hommes. En 2014, l’opération Barkhane a vite remplacé les opérations Épervier et Serval pour appuyer les pays sahéliens partenaires.
Quant au désengagement des militaires français du Niger, il a commencé le 5 octobre 2023. Paris ayant annoncé que le retrait des 1 500 soldats français présents au Niger serait effectif d’ici la fin de l’année 2023.
La France comptait entre 1 300 et 1 500 soldats déployés au Niger, ainsi que des avions de chasse et des drones. Ces hommes déployés dans le pays sont affectés dans trois bases à Niamey, la capitale, à Ouallam, au nord de la capitale, et à Ayorou, vers la frontière avec le Mali.
Ayant élu domicile à l’aéroport international Hamani Diori, la base aérienne 101 de Niamey, servait de base de départ des drones Reaper . Son but ? Réaliser des missions de renseignement et de reconnaissance dans le cadre de l’opération Barkhane .
On soulignera volontiers que l’influence française dans les Afriques » a toujours été portée par 3 piliers : les relations fraternelles entre élites, le franc CFA et la présence militaire. Cette dernière a du reste permis l’appui aux régimes amis, de projeter et protéger les intérêts de la France et une capacité d’intervention militaire rapide « , rappelle Bruno Charbonneau, professeur titulaire au Collège militaire royal de Saint-Jean.
« C’est ainsi que la présence militaire française en Afrique a aussi toujours permis à la France d’être au cœur des mécanismes de résolution et de gestion des conflits en Afrique francophone, notamment au Conseil de sécurité de l’ONU », précise Bruno Charbonneau.
Quoi qu’il en soit, les Afriques demeureront capitales quant à Paris et son activisme sur le continent . Il en va de la projection de la puissance française à l’étranger.
Étant entendu que la France cultive une interdépendance avec la région qui ne saurait être démentie : binationaux français résidant en Afrique francophone ou encore de la densité du réseau diplomatique. Et ce même s’il a connu une évolution en peau de chagrin, ou encore de la zone Franc.
« En outre, les pays africains jouent un rôle central dans l’Organisation internationale de la francophonie et sont d’une importance cruciale pour le maintien du français en tant que langue mondiale dans un environnement mondial de plus en plus multipolaire et concurrentiel, dans lequel sa position en Afrique est de plus en plus contestée par des puissances émergentes telles que la République populaire de Chine, l’Inde, les pays du Moyen-Orient et le Brésil. » Indique Bruno Charbonneau
Il va sans dire que Paris a un intérêt géopolitique primordial à maintenir sa présence militaire dans la région, où elle est défiée dorénavant dans son pré-carré par Pékin, par moscou et par Ankara… du reste, les aéroports de Niamey et de Dakar flambant neufs ont été dessinés et construits par les Turcs … quand la logique laisse à penser qu’il en revenait au français ADP…
Dans ce contexte, les relations bilatérales étroites qu’elle entretient avec certains pays clés, peuvent être considérées comme le moyen le plus efficace pour une puissance de taille moyenne de maintenir sa position en tant qu’acteur clé sur le continent.
Par ailleurs, il va s’en dire que la montée en puissance d’une jeunesse contestataire, du principe de souverainisme, à un moment où les Afriques ont le choix de multiplication des partenaires et de leur diversification, posent assurément un problème épineux à la France.
Chemin faisant, Paris ne saurait occulter ses intérêts économiques en Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale. Il en va du pétrole au Gabon, au Congo Brazzaville ou dans le Golfe de Guinée.
Il peut s’agir dans une moindre mesure de l’uranium au Niger, ou encore du commerce du cacao et du café en Côte d’Ivoire, des services bancaires, (étant entendu que ces derniers seront remplacés à court terme par des banques marocaines), des transports et autres services , tels que l’eau, la communication ou la téléphonie.
Pour l’heure, le départ du contingent français du Niger laisse un goût amer surtout à l’aune de la posture des Etats-Unis qui a traité son allié comme un « faux ami ». Étant entendu qu’ils n’ont qu’un objectif : conserver leurs bases militaires au Niger, celles de Niamey et d’Agadez au Nord. Ils jouent assurément leur propre participation dans cette guerre qui opposera dorénavant les Etats-Unis, le groupe Wagner et les terroristes.
La priorité des Américains, réside dans leur positionnement stratégique dans la sous-région. Bouter les Français hors du Sahel.
La priorité des Etats-Unis ? Ce n’est ni la présence française ni le retour à l’ordre constitutionnel- même si Washington a fini par reconnaître le Coup d’État au Niger.
Pour le Pentagone, il s’agit de conforter un positionnement stratégique afin d’avoir un œil en temps réel et sur place au Sahel ; et ce, tout à la fois sur le bassin du lac Tchad, mais aussi sur la Libye, comme au Soudan.
Olivier d’Auzon