L’escalade de la crise congolaise… Le début d’un plan de partition ?
En 1963, environ 30 États africains nouvellement indépendants se sont réunis à Addis-Abeba pour fonder l’Organisation de l’unité africaine, établissant un principe fondamental : l’intangibilité des frontières héritées de la colonisation. Toute modification de ces frontières était perçue comme une menace risquant d’entraîner la fragmentation du continent en raison des conflits territoriaux.
Pendant six décennies, ce principe a globalement résisté, malgré quelques violations. Toutefois, depuis janvier dernier, des inquiétudes croissantes ont émergé quant à sa pérennité. La République démocratique du Congo (RDC) a été envahie à grande échelle par le M23, un groupe rebelle soutenu par le Rwanda, occupant de vastes territoires dans l’est du pays, où vivent plus de 5 millions de personnes.
Chute des grandes villes
D’après le magazine américain “Foreign Affairs”, en l’espace de quelques semaines, les rebelles ont pris le contrôle de Goma, la plus grande ville de la province du Nord-Kivu, suivie de Bukavu, capitale du Sud-Kivu, ainsi qu’un aéroport stratégique, isolant ainsi les forces congolaises et coupant leurs approvisionnements.
Les estimations gouvernementales font état de 7 000 morts jusqu’à présent.
De son côté, le M23 prétend combattre les groupes extrémistes hutus responsables du génocide rwandais et réfugiés à l’est du Congo. Cependant, l’ONU et les bailleurs de fonds du Rwanda rejettent cet argument, affirmant que Kigali exploite le conflit pour tirer profit du trafic de minerais et du pillage des ressources naturelles congolaises.
Redessiner les frontières du Rwanda
Les intentions du président rwandais Paul Kagame suscitent de plus en plus d’interrogations, notamment après son discours de 2023, où il affirmait que les frontières historiques du Royaume du Rwanda s’étendaient vers l’Ouganda au nord, le Burundi au sud et une grande partie du Congo à l’ouest.
Des observateurs et diplomates estiment que les actions de Kagame traduisent une volonté de découper la RDC et d’accroître l’influence rwandaise dans la région. Certains craignent qu’il cherche à redéfinir les frontières coloniales et à imposer une tutelle directe sur certaines régions congolaises.
Dans le contexte actuel de tensions, un scénario encore plus alarmant se profile : un changement de régime à Kinshasa, similaire à ce qui s’est produit par le passé.
Réactions internationales
Malgré l’inquiétude croissante, les grandes puissances n’ont pas réagi avec assez de rapidité pour stopper l’expansion rwandaise.
Au départ, les Occidentaux se sont contentés de déclarations de condamnation, et le Conseil de sécurité n’a adopté une résolution officielle dénonçant l’attaque que le 21 février, exigeant un cessez-le-feu immédiat et le retrait des forces rwandaises.
Après la chute de Bukavu :
🔴 Les États-Unis ont imposé des sanctions contre un ministre rwandais influent.
🔴 Le Royaume-Uni a suspendu son aide bilatérale à Kigali.
🔴 L’Union européenne a annoncé une révision de son accord d’exploitation minière avec le Rwanda.
🔴 Les pays africains envisagent l’envoi d’une nouvelle force de maintien de la paix, bien que les précédentes tentatives aient échoué.
Quel avenir pour la RDC ?
Si le Rwanda et le M23 parviennent à atteindre leurs objectifs, le Congo risque de basculer dans une troisième guerre depuis la fin des années 1990, aggravant une crise humanitaire où plus de 7 millions de personnes sont déjà déplacées.
Plus préoccupant encore, si Kigali, soutenu par les puissances occidentales et des institutions financières internationales comme la Banque mondiale et le FMI, parvient à s’approprier des territoires congolais, cela pourrait provoquer l’effondrement d’un principe fondamental du droit international : le respect de l’intégrité territoriale des États.