La présence Turc en Afrique : le cas d’Afrique Centrale et australe

Fév 9, 2021 | Afrique, Études

Dr. Mady Ibrahim Kanté

Le continent africain est riche en ressources naturelles, possède une main-d’œuvre jeune. Ainsi qu’un énorme potentiel de développement, mais on trouve dans le continent une pauvreté extrême au milieu de ces énormes richesses. Puis, la stabilité politique qui fait aussi défaut, la lutte contre le terrorisme, l’éradication de la pauvreté et la réalisation du développement durable sont les principales priorités de beaucoup de pays africains. En effet, depuis l’indépendance des Etats africains, ils continuent de souffrir de tout le retard économique, l’insécurité et l’instabilité politique.

La Turquie fait partie des pays qui se sont tournés vers l’Afrique avec l’idée de la politique de «Gagnant-Gagnant» dans les relations de coopération bilatérale et multilatérale. Puis une grande partie des pays africains, s’est engagée pour établir une relation et coopération avec Ankara, dès lors les turcs s’installent sur le continent via ses voies diplomatico-religieuses.

Depuis 2005, la Turquie a entamé une nouvelle politique à l’égard de l’Afrique avec une ouverture totale sur le continent, politiquement, économiquement et sur le front de la sécurité. Certes, la Turquie cherche toujours à élargir et approfondir ses relations avec l’ensemble du continent africain. Au cours de la dernière décennie, Erdogan, alors qu’il était Premier ministre puis président de la république, a pu se rendre en Afrique dans le cadre de voyages officiels plus de trente fois, au cours desquelles il s’est rendu dans 23 pays africains. En plus de la tenue du premier sommet de coopération turco-africaine à Istanbul en 2008 et du deuxième à Maputo[1], la Turquie se réjouit d’accueillir le troisième sommet de coopération turco-africaine à Istanbul en 2019. Ceci témoigne de la vision stratégique de la Turquie en Afrique, comme il développe de nouvelles relations bilatérales avec les pays africains. Par conséquent, Ankara a étendu sa présence diplomatique sur le continent de 12 ambassades et consulat en 2004 à 39 en 2016, et rien qu’en 2012, la Turquie a contribué 800 millions de dollars aux programmes d’aide fournis aux africains[2]. Le volume des échanges commerciaux de la Turquie avec l’Afrique dépasse aujourd’hui 25 milliards de dollars, et sur la période 2009-2018 il a atteint 179 milliards de dollars[3]. Les importations –matières premières pour la grande partie- de la Turquie en provenance du continent africain sont passées de 3,3 milliards de dollars en 2003 à 9,6 milliards de dollars en 2012. Les importations comprenaient de nombreuses matières, notamment des lubrifiants, des perles, des pierres précieuses, des produits chimiques inorganiques et du cacao[4]. On peut dire que la Turquie est l’une des cinq économies émergentes ayant le plus grand volume d’échanges avec le continent africain.

Ankara vers l’Afrique centrale et australe

Depuis l’arrivée de Recep Tayyip Erdogan au pouvoir, la politique étrangère turque envers les pays d’Afrique centrale et australe s’est diversifiée, en développant des relations équilibrées avec ces petits Etats qui peuvent soutenir et renforcer la position de la Turquie sur la scène internationale, notamment dans les Organisations internationales comme les Nations Unies. Car elle a besoin du soutien africain dans sa propagande contre l’Occident. Ensuite, de nouveaux plans d’action ont été élaborés avec les pays d’Afrique centrale et australe, en termes de relations politiques, culturelles et sécuritaires qui n’existaient pas auparavant entre la Turquie et ces pays. Partant d’étapes symboliques et tangibles, des visites diplomatiques, ouverture de représentations diplomatiques se multiplient dans ces deux régions africaines. La Turquie cherche à aider ces Etats dans sa « politique sage », qui est basée sur la résolution de leurs problèmes par eux-mêmes avec l’aide d’Ankara sans intervention directe.

Au vu des relations développées, il existe à Ankara des ambassades pour les pays d’Afrique centrale et australe : la République d’Afrique du Sud depuis longtemps, et ces dernières années, la République démocratique du Congo, le Cameroun, l’Angola, le Gabon et la Zambie ont ouvert des ambassades en Turquie[5]. Dans ce contexte, chacun de ces pays a commencé à construire une relation bilatérale avec la Turquie. Outre, on peut remarquer, l’activité croissante des entreprises turques dans divers domaines (culturel et sécuritaire) au Cameroun, en Afrique du Sud, en République démocratique du Congo (RDC), au Tchad, en république centrafricaine (RCA), etc.[6].

Le domaine d’aide humanitaire : certains pays d’Afrique centrale reçoivent chaque année plus de 55 tonnes d’aide humanitaire envoyées depuis la Turquie via la Plateforme de secours humanitaire, géré par « le Département turc de gestion des catastrophes et des urgences et la Commission de secours humanitaire », pour une illustration, le Tchad et le Cameroun qui accueillent les réfugiés de la RCA, reçoivent des aides humanitaires turques, depuis le début de la crise Centrafricaine[7].

Le rôle sécuritaire et militaire : la Turquie a vu l’importance du continent africain dans le domaine de la coopération, ainsi la coopération militaire. Ensuite, il a augmenté son budget de l’aide au développement et la coopération militaire avec les pays d’Afrique centrale et australe. En effet, la Turquie a envoyé ses soldats en Afrique centrale pendant des crises via l’OTAN ou les missions des Nations Unies. En outre, les pays d’Afrique centrale ont été confrontés au phénomène du terrorisme (Tchad, Cameroun, République centrafricaine, etc.), de sorte que la Turquie a formé plus de deux mille soldats africains dans le domaine de la lutte contre le terrorisme, de la paix et de la sécurité maritime. D’autant plus que les forces turques allaient apporter un soutien pour restaurer la stabilité en Afrique centrale et dans d’autres régions africaines, et soutenir la nouvelle phase politique qui s’y déroule[8].

La coopération militaire, fait toujours appel à des accords de défense, par conséquent, des accords entre le Cameroun et la Turquie ont été signés depuis juin 2014, et les accords militaires entre les deux pays incluent des aspects de coordination technique et de formation, ainsi que l’armement dont le Cameroun bénéficie en achetant des armes légères de fabrication turque. L’ambassadeur de Turquie au Cameroun, Umar Faruk Dogan, a déclaré : « La Turquie soutient fermement la sécurité et la stabilité du Cameroun« , soulignant aussi que « le développement des relations au niveau de la défense et de la sécurité nous preoccupe … Nous sommes convaincus que la paix en Afrique centrale passe par la stabilité du Cameroun« , a-t-il ajouté. Donc, Dogan a salué le soutien de son pays à la guerre contre le terrorisme, en affirmant que « la Turquie, qui a déjà souffert du terrorisme, ne peut pas laisser le Cameroun seul à cet égard« [9]. Alors avec un certain nombre de chefs d’entreprises militaro-industrielles turques au Cameroun, qui poursuivre le renforcement de la coopération militaire entre les deux pays, apprécie par l’Etat camerounais, en voyant comme un moyen de la lutte contre le groupe terroriste «Boko Haram»[10].

En conclusion, nous pouvons dire qu’un certain nombre d’entreprises turques opérant non seulement dans le domaine du commerce, de l’éducation, mais aussi dans la sécurité et de la défense qui poursuivirent leurs activités dans les pays d’Afrique centrale comme australe, Ankara continue à élargir sa présence sur le continent, avec ses différentes stratégies d’insertion.

[1] https://www.dailysabah.com/arabic/turkey/2016/03/01/turkeys-strategic-depth-in-africa

[2] http://www.turkpress.co/node/30500

[3] https://www.aa.com.tr/fr/afrique/turquie-afrique-179-milliards-de-d%C3%A9changes-lors-des-10-derni%C3%A8res-ann%C3%A9es-/1462814

[4] https://bit.ly/2YQolNN

[5] https://www.dailysabah.com/arabic/turkey/2016/03/01/turkeys-strategic-depth-in-africa

[6] http://www.turkpress.co/node/27333

[7] https://www.ihh.org.tr/ar/news/turkey-carries-hope-to-central-africa-2378

[8] http://www.turkpress.co/node/3694

[9] http://www.alhadath.ps/article/14548/index.php

[10] https://bit.ly/2NcQdco

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