La convergence entre Washington et New Delhi, permet à l’Inde de s’affirmer contre la Chine

Sep 20, 2023 | Afrique, Europe, France, Les rapports

Chacun constatera qu’à l’aune d’un multilatéralisme en devenir, l’Inde, en tant que puissance moyenne, ne peut que militer pour la promotion d’un plus grand dynamisme de ce nouveau monde, en rappelant volontiers aux Occidentaux que les institutions mondiales existantes ne sont pas du tout représentatives de l’ordre mondial émergent.

La tendance la plus significative qui structure aujourd’hui l’engagement extérieur de l’Inde est marquée par l’extraordinaire convergence entre Washington et New Delhi.

A ce titre, le Premier ministre Narendra Modi a-t-il pas retranscrit la déclaration finale du G20 avec la bienveillance et le soutien indéfectible du Président des Etats-Unis Joe Biden ?
Pour mémoire, l’Inde et les États-Unis ont souvent été antagonistes lors des sommets internationaux. Mais aujourd’hui, Washington met de l’eau dans son vin. Et force est de constater que cela permet à New Delhi de prendre l’initiative ; et elle aurait tort de s’en priver.
Et c’est ainsi que l’Inde parvient de mieux en mieux à tirer parti de ses convergences avec les États-Unis.

Ce soutien de Washington à New Delhi est à marquer d’une pierre blanche. Il raffermit par la même les relations de New Dehli avec l’Occident au sens large du terme.
Même si l’Europe était initialement réticente à soutenir « l’édulcoration » du discours du G20 quant à l’Ukraine, Washington a joué un rôle déterminant dans la réduction de ce fossé avec l’Inde.

New Delhi est parfaitement consciente qu’à l’heure où la montée en puissance de la Chine façonne les priorités stratégiques mondiales, un engagement solide avec l’Occident est un impératif politique, estime le Professeur HARSH V. PANT dans son article : The G20 showed India’s foreign policy is exploring new territory.

Malgré le défi posé par l’Ukraine, les liens de l’Inde avec l’Occident se sont renforcés.

C’est cette compréhension de la position de l’Inde à l’égard de la Russie qui a non seulement rendu possible la Déclaration du G20, qui s’est tenu à New Delhi, les 9 et 10 septembre 2023 a également permis à l’Inde de maintenir ouverts ses canaux privilégiés de communication avec Moscou.

Dans ce contexte, la question russe occupe aujourd’hui une place plus que centrale dans le fondement de la politique étrangère indienne.
C’est ainsi que gérer les liens avec « une puissance en déclin » est une tâche difficile en diplomatie et New Delhi est assurément désireux d’apaiser les inquiétudes russes quant à son intention de l’abandonner. Cela a du reste trouvé un écho dans la façon dont l’Inde a abordé la question ukrainienne au G20, où sur toute une série de questions ayant trait tout à la fois à la souveraineté territoriale et à la charte de l’ONU, ou encore à la menace d’utilisation d’armes nucléaires où la Russie a été ciblée sans être nommée.
Et si pour Moscou, l’adhésion à la Chine est plus rassurante, pour New Delhi, les défis à relever n’en deviennent que plus importants.
La Chine a joué un rôle important tout au long du processus du G20, où ses tendances « obstructionnistes » étaient pleinement visibles.

Pour autant l’Inde a également démontré sa capacité à travailler avec d’autres pays partageant les mêmes idées pour repousser Pékin. La menace d’être considérée comme un « spoiler » par une grande partie du monde, et en particulier par les pays du Sud, a finalement amené la Chine à la table des négociations. Mais l’absence de Xi Jinping a mis en évidence à quel point la dichotomie Chine-Inde est en passe de devenir rapidement une ligne de fracture majeure qui apparaît désormais au grand jour sur dans les sommets internationaux.

Aujourd’hui l’optimisme béat selon lequel, la Chine et l’Inde seront à même de mettre de côté les tensions et les oppositions légendaires dans le cadre de leurs relations bilatérales est bien révolu. Au G20, l’Inde a montré qu’elle peut tirer parti de ses partenariats ad hoc pour défier la Chine ; et cela de plusieurs manières déclare volontiers HARSH V. PANT.

Dans cette perspective, ce sont assurément les liens étroits de l’Inde avec les États-Unis, les pays du Moyen-Orient et l’Europe qui ont rendu possible le corridor logistique Inde-Moyen-Orient-Europe.

L’ouverture mondiale de l’Inde auprès des acteurs anciens et nouveaux, de l’Afrique en passant par le Moyen-Orient, a été très largement mise en évidence au G20, il s’agit bel et bien de la tendance de fond qui façonne les aspirations de New Delhi en matière de politique étrangère.

On l’aura compris, l’Inde apparaît plus sûre d’elle-même. Elle trace aujourd’hui sa route dans la politique mondiale.

Pour se faire, sa stratégie sera empreinte de pragmatisme où s’afficheront des objectifs clairement définis. Ce qui passera par la création de coalitions ad hoc d’acteurs partageant les mêmes idées.

Son succès au G20, dépend moins du reste, de son rôle dans l’ordre multilatéral que de la manière dont elle entend poursuivre ses objectifs nationaux, jetant aux orties toute posture idéologique.
Sources :The G20 showed India’s foreign policy is exploring new territory.

Olivier d’Auzon

Mots clés :#G20 | Afrique | Europe | france
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