Congo Brazzaville entre la démocratie et la stabilité : L’Empereur « Denis Sassou-Nguesso » du Congo-Brazzaville 36 ans au pouvoir

Avr 25, 2021 | Afrique, Études

Dr. Mady Ibrahim Kanté

La république du Congo (Congo-Brazzaville), l’un des petits pays africains riches en ressources naturelles. Il est un pays d’Afrique centrale, situé de part et d’autre de l’équateur[1]. Le pays s’étend sur 1 500 km du nord au sud et 425 km d’est en ouest. Avant la colonisation française, le territoire actuel du Congo faisait partie des plusieurs royaumes africains. Par contre, le territoire était occupé par plusieurs missions européennes d’exploration, dont la plus notable reste celle de Savorgnan de Brazza (d’où le nom de la capitale du pays vient). Avec l’installation des colons, ce territoire se trouva intégré au second empire colonial français à la fin du XIXe siècle[2]. Après 70 ans de colonisation, il prend son indépendance en 1960, avec pour premier chef de l’État l’abbé Fulbert Youlou.

Comme d’autres pays africains, suite à l’indépendance, les tentatives de coup d’Etat continuaient pendant deux décennies, dont quatre réussissent (1963, 1968, 1977 et 1979). En effet, la crise de l’intégration nationale est apparue claire lorsque le système politique apparaissait incapable de construire l’État national, où le désir de vivre ensemble a disparu parmi les groupes qui composent la société en tant que partenaires égaux, d’une manière qui rend difficile l’application du terme « citoyens » aux groupes qui vivent sur le territoire de cette société. Il est même difficile d’appliquer le terme « patrie » à cette entité.

Le pays comme Congo, se trouva dans l’incapacité des systèmes politiques à gérer le conflit intercommunautaire, d’une part, en raison de la corruption des régimes et de leurs préjugés envers un groupe ethnique au détriment d’un autre, ce qui a conduit à un affaiblissement de leur capacité à répondre – même au minimum – aux exigences des divers autres groupes ethniques. D’une autre part, malgré sa petite superficie le différent régime du Congo n’a pas été en mesure de contrôler l’ensemble des régions.

Révolutions ou la quête du pouvoir

Denis Sassou Nguesso, (en tant que révolutionnaire, à côté de Capitaine Marien Ngouabi)[3], jeune marxiste, co-fondateur du Parti congolais du travail (PCT), a participé au renversement de plusieurs chefs d’Etat congolais. À la suite de l’assassinat du président Marien Ngouabi, le 18 mars 1977, le Colonel Denis Sassou-Nguesso, un membre influent du PCT, a joué un rôle de premier plan dans le Comité militaire du parti (PCT). Toutefois, Sassou occupait les postes de premier vice-président et de ministre de la Défense dans le gouvernement de transition. Dans lequel, un bras de fer s’est joué graduellement entre lui et le président, Joachim Yhombi-Opango. Qui a fini par une accusation de corruption, puis est écarté de son poste (Président de la transition) lors d’une séance du Comité central du PCT, le 5 février 1979. Par conséquent, Mr. Sassou a accédé au pouvoir le 8 février 1979, provisoirement à la présidence de la République populaire du Congo. Confirmé dans ses fonctions lors d’un congrès extraordinaire du PCT, en mars de la même année. En effet, Sassou-Nguesso restait à la tête de l’État jusqu’au début des années 1990. Dans l’élan des réformes démocratiques qui ont soufflé à ce moment, il est largement défait à la présidentielle de 1992 alors que le PCT avait perdu sa position dominante au Parlement face à l’opposant Pascal Lissouba. Puis, Mr. Sassou-Nguesso était revenu toutefois à la présidence en 1997.[4]

L’évolution démocratique au Congo-Brazzaville

En Afrique comme dans le reste du Monde, la chute du mur de Berlin, en novembre 1989, et le discours de La Baule, le 20 juin 1990, ont réellement apporté un vent de changement démocratique. Quant au Congo-Brazzaville comme d’autres pays africains, les présidents dictateurs avec leur parti unique, étaient impuissants devant les anciens maitres qui demandaient la démocratisation et l’instauration de multipartisme en Afrique. Lors d’une conférence nationale, qui s’est déroulé du 25 février au 10 juin 1991, le président Denis Sassou-Nguesso a annoncé la mise en place du multipartisme. Alors, Pascal Lissouba, le candidat de l’Union panafricaine pour la démocratie sociale (UPADS), a remporté l’élection présidentielle du 2 août 1992 avec 61,3% des voix.[5]

La guerre contre la démocratie

Sassou-Nguesso, rentra de l’exil (France) déterminé que plus jamais, avec une guerre politique contre le président Pascal Lissouba et sa milice, les Zoulous. Dès lors, Denis Sassou Nguesso et sa milice, les Cobras ont remporté la victoire grâce au soutien militaire déterminant du régime angolais bien évidemment que d’autres soutiens étrangers. Le chef de l’État, Denis Sassou-Nguesso, a pris le pouvoir par les armes en 1997. Depuis qu’il s’est emparé du pouvoir, l’empereur a établi une bonne relation avec l’ancien colon, en se mettant au service de l’ex-maitre, afin d’avoir la protection de son pouvoir, dans ce pays pétrolier d’Afrique centrale de 5 millions d’habitants, dont la France est le premier donateur d’aide publique au développement. Quant au niveau interne, le Président Sassou-Nguesso, a mis en place deux mesures nécessaires, la première, est de mener la pression absolue sur toute une opposition politique, d’après l’Observatoire congolais des droits de l’Homme sur le régime Sassou-Nguesso, « La terreur et la répression permanentes conjuguées avec la manipulation de l’opinion publique internationale par les gouvernants »[6]. Bien que les discours et les lois, affirment toujours la justice est pour la protection des citoyens, toute une autre réalité sur le terrain ; des droits humains sont bafoués, avec une justice défaillante, une police violente et corrompue.[7] Par conséquent, plusieurs personnalités politiques et de la société civile se trouvent soit en exil, soit en prison.[8] Quant à la deuxième mesure prise par le régime, l’organisation des dialogues nationaux continuelle, afin d’équilibrer le jeu politique et pour donner un vernis de légitimité au processus électoral actuel.[9]

Il est vrai que généralement, en Afrique, la constitution et bien d’autres textes juridiques ne se sont pas justifiés par des exigences endogènes mais par l’application d’une pédagogie internationale très bien présentée, sous le mode métaphorique.[10] Chaque fois, au cas où le Chef aurait besoin d’un changement pour tendre son mandat, les propositions viennent des institutions compétentes, afin de modifier l’article du mandat de président, comme le cas récent, tel que la Guinée, la Cote d’Ivoire, etc. Quant au Congo-Brazzaville, l’article 65. Prévoit que « Le Président de la République est élu pour un mandat de cinq (5) ans renouvelable deux (2) fois »[11]. En 2015, le chef de l’État a fait sauter le verrou constitutionnel qui limitait à deux le nombre de mandats présidentiels.[12]

Pour conclure, le dimanche, 21 mars, les Congolais étaient appelés aux urnes pour désigner leur président. En l’absence de plusieurs leaders de l’opposition aujourd’hui emprisonnés ou en exil, les électeurs ont voté pour le président sortant, Denis Sassou-Nguesso, qui a été réélu avec 88,57% des voix. Le chef de l’Etat s’est présenté pour la quatrième fois consécutive.[13] En effet, le président, vient d’être investi le 16 avril 2021, pour un quatrième mandat de cinq ans, à 77 ans, dont bientôt 37 cumulés au pouvoir, dans les mains d’un seul homme M. Sassou « l’Empereur ». Avec des promesses pour chaque élection, pourrions-nous dire que le président Empereur, est au pouvoir pour servir les intérêts étrangers en échange de son intérêt personnel et celui de son clan, jusqu’en trouvant un remplaçant, comme ça se fait dans beaucoup de pays  en Afrique. Les victimes de ce jeu sont les peuples africains, notamment les jeunes, qui ont perdu tout espoir de rester en Afrique, préférés d’aller mourir dans l’océan que de rester dans la misère infinie.

[1] Ses voisins sont le Gabon à l’ouest, le Cameroun au nord-nord-ouest, la République centrafricaine au nord-nord-est, la République démocratique du Congo au nord-est, au sud-est et au sud — de laquelle il est séparé, en partie, par le fleuve Congo puis l’Oubangui — et le Cabinda (Angola) au sud-ouest.

[2] https://fr.wikipedia.org/wiki/Second_empire_colonial_fran%C3%A7ais

[3] Président congolais (1969-1977).

[4] « Accession de Denis Sassou-Nguesso à la présidence de la République populaire du Congo | Événements | Perspective Monde », consulté le 20 avril 2021, https://perspective.usherbrooke.ca/bilan/servlet/BMEve/1275.

[5] « Élection de Pascal Lissouba à la présidence de la République du Congo | Événements | Perspective Monde », consulté le 20 avril 2021, https://perspective.usherbrooke.ca/bilan/servlet/BMEve/1277.

[6] « République du Congo : “la démocratie et l’État de droit doivent encore attendre” », TV5MONDE, 9 mai 2019, https://information.tv5monde.com/afrique/republique-du-congo-la-democratie-et-l-etat-de-droit-doivent-encore-attendre-299266.

[7] « République du Congo ».

[8] « « La République du Congo, comme la diplomatie française, doit renouer avec la démocratie » », Le Monde.fr, 16 mars 2021, https://www.lemonde.fr/afrique/article/2021/03/16/la-republique-du-congo-comme-la-diplomatie-francaise-doit-renouer-avec-la-democratie_6073376_3212.html.

[9] « « La République du Congo, comme la diplomatie française, doit renouer avec la démocratie » ».

[10] Bankounda Félix, « Congo-Brazzaville. Une septième Constitution pour quoi faire ? », Politique africaine, 2001/1 (N° 81), p. 163-170. DOI : 10.3917/polaf.081.0163. URL : https://www.cairn.info/revue-politique-africaine-2001-1-page-163.htm

[11] « Constitution de la République du Congo, 2015 », consulté le 21 avril 2021, https://www.ilo.org/dyn/natlex/docs/ELECTRONIC/100814/121082/F1693068911/COG-100814.pdf.

[12] « Présidentielle au Congo-Brazzaville : Denis Sassou Nguesso brigue un quatrième mandat », France 24, 19 mars 2021, https://www.france24.com/fr/afrique/20210319-pr%C3%A9sidentielle-au-congo-brazzaville-le-pr%C3%A9sident-denis-sassou-nguesso-favori-du-scrutin.

[13] « « La République du Congo, comme la diplomatie française, doit renouer avec la démocratie » ».

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