Le Rapport mondial sur la faim 2024, basé sur les données de l’UNICEF et de l’ONU, révèle une crise alimentaire mondiale d’une ampleur préoccupante.
Alors que les efforts internationaux pour éradiquer la faim se poursuivent, des facteurs systémiques et conjoncturels continuent d’aggraver la situation pour des millions de personnes. Ce rapport détaille les chiffres, les causes, les zones les plus touchées, ainsi que les implications humanitaires et politiques de cette crise.
295,3 millions de personnes souffrent de la faim dans 53 pays, un chiffre qui illustre l’étendue géographique et humaine de la crise. Cela représente une part significative de la population mondiale, concentrée majoritairement dans des régions en développement. 1,9 million de personnes sont en situation de famine imminente (classée comme phase 5 selon l’IPC – Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire).
Cette catégorie signifie que ces populations font face à une absence quasi totale d’accès à la nourriture, entraînant des taux de mortalité élevés, notamment chez les enfants et les personnes âgées.
Sur ces 295,3 millions, environ 40 % sont des enfants, selon les estimations de l’UNICEF, ce qui accentue les risques de malnutrition chronique et de retard de croissance, avec des conséquences à long terme sur leur développement physique et cognitif.
La faim en 2024 est le résultat de facteurs multiples, souvent interconnectés. Les conflits armés, qui affectent 20 pays comme le Soudan, le Yémen et la Syrie, restent la cause principale.
Les violences détruisent les infrastructures agricoles, déplacent les populations (plus de 50 millions de déplacés internes dans ces 20 pays) et bloquent les routes d’approvisionnement. Au Soudan, par exemple, les affrontements entre factions armées ont détruit des marchés locaux et empêché les agriculteurs de cultiver leurs terres, plongeant des régions entières dans l’insécurité alimentaire.
Les chocs climatiques, touchant 18 pays comme le Mozambique, le Pakistan et la Somalie, aggravent également la situation. En 2024, la Corne de l’Afrique a subi une sécheresse historique, la pire en 40 ans, réduisant les rendements agricoles de 60 % dans certaines zones.
Les populations rurales, qui dépendent souvent de l’agriculture de subsistance, sont les plus touchées, avec des pertes de bétail et de récoltes massives. Enfin, l’instabilité économique, présente dans 15 pays, contribue à la crise. L’inflation mondiale, exacerbée par les répercussions économiques des conflits et des crises énergétiques, a fait grimper les prix des denrées alimentaires.
Au Nigeria, le prix du riz a augmenté de 70 % en 2024, rendant ce produit de base inabordable pour des millions de familles. La dévaluation des monnaies locales et le chômage de masse (jusqu’à 30 % dans certains pays) ont encore aggravé l’accès à la nourriture.
Certaines zones sont particulièrement touchées. Au Soudan, 25 millions de personnes sont affectées, soit 50 % de la population, un niveau jamais atteint auparavant. La guerre civile, qui oppose l’armée soudanaise aux Forces de soutien rapide depuis 2023, a détruit les infrastructures agricoles et bloqué l’acheminement de l’aide humanitaire.
Les régions du Darfour et du Kordofan sont les plus touchées, avec des taux de malnutrition aiguë dépassant 30 % chez les enfants de moins de 5 ans.
Les organisations humanitaires rapportent des cas de famine confirmés dans certaines zones, avec des familles contraintes de consommer des feuilles ou des insectes pour survivre. À Gaza, 1,1 million de personnes sont en situation critique, soit environ 50 % de la population de la bande de Gaza.
Le conflit israélo-palestinien, intensifié en 2024, a limité l’accès à l’aide humanitaire, avec des blocus empêchant l’entrée de nourriture, d’eau et de médicaments. Les infrastructures de base, comme les boulangeries et les marchés, ont été détruites, et 80 % des habitants dépendent entièrement de l’aide extérieure, qui reste insuffisante.
Les enfants et les femmes enceintes sont les plus vulnérables, avec des cas de malnutrition aiguë sévère en hausse de 40 % par rapport à 2023. En Afghanistan, une amélioration notable est observée, avec 8 millions de cas de faim en moins sur les trois dernières années (2021-2024).
Cette amélioration est attribuée à une relative stabilisation politique après 2021, ainsi qu’à une augmentation de l’aide humanitaire internationale (notamment via le Programme alimentaire mondial).
Cependant, 15 millions de personnes restent en insécurité alimentaire, en raison de la persistance des défis économiques (inflation de 50 % sur les produits de base) et des sécheresses récurrentes affectant les cultures. Les femmes, souvent exclues du marché du travail sous le régime taliban, sont particulièrement vulnérables.
La faim chronique entraîne des conséquences graves, notamment des retards de croissance chez les enfants, une augmentation des maladies comme le kwashiorkor et une mortalité infantile élevée (jusqu’à 20 % dans les zones de famine). Les crises alimentaires poussent des millions de personnes à migrer, créant des camps de réfugiés surpeuplés où les conditions sanitaires sont désastreuses, comme au Soudan du Sud.
Les femmes et les filles sont disproportionnellement touchées, souvent contraintes de manger en dernier ou de se priver pour nourrir leurs enfants. La rareté des ressources alimentaires attise également les tensions communautaires, exacerbant les conflits existants dans des régions comme le Sahel.
Malgré les appels de fonds de l’ONU (estimés à 50 milliards de dollars pour 2024), seuls 40 % des besoins ont été financés, selon les rapports de l’UNICEF. Dans les zones de conflit comme Gaza et le Soudan, l’acheminement de l’aide est entravé par les violences et les blocus, avec moins de 10 % des convois humanitaires pouvant atteindre certaines régions du Darfour en 2024.
Les chocs climatiques nécessitent des solutions à long terme, comme des systèmes agricoles résilients, mais les investissements dans ces initiatives restent faibles (moins de 5 % des fonds humanitaires). Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a lancé un cri d’alarme :
« Réduire l’aide humanitaire, c’est échouer l’humanité. » Cette déclaration met en lumière l’urgence d’une mobilisation mondiale pour répondre à la crise, tout en soulignant les conséquences morales et politiques d’un désengagement.
Pour répondre à cette crise, plusieurs actions sont nécessaires. Les pays donateurs doivent augmenter le financement humanitaire pour combler le déficit de financement. Les parties belligérantes doivent garantir des couloirs humanitaires sécurisés pour permettre l’acheminement de l’aide. Il est également crucial d’investir dans la résilience climatique, en développant des agricoles adaptés aux chocs climatiques, comme l’irrigation durable et les cultures résistantes à la sécheresse.
La résolution des conflits armés est essentielle pour rétablir la sécurité alimentaire dans des pays comme le Soudan et Gaza. Enfin, des programmes ciblés pour les enfants, les femmes et les déplacés doivent être mis en place afin de réduire les impacts à long terme de la malnutrition.
La crise de la faim en 2024 est un défi humanitaire majeur, touchant 295,3 millions de personnes à travers 53 pays, dont 1,9 million au bord de la famine. Les conflits armés, les chocs climatiques et l’instabilité économique en sont les moteurs principaux, avec des impacts dévastateurs au Soudan et à Gaza, bien que des progrès soient observés en Afghanistan.
Comme l’a souligné Antonio Guterres, réduire l’aide humanitaire revient à abandonner notre responsabilité collective. Une action concertée, combinant aide d’urgence, solutions à long terme et efforts de paix, est cruciale pour inverser cette tendance et préserver la dignité humaine.