Enjeux de Sécurité en Afrique : Perspectives et Actions de la France

Avr 17, 2024 | Afrique, France, Les rapports, politique, Terrorisme

Lors de la séance à huis clos qui s’est tenue à l’Assemblée nationale le 20 décembre 2023, les principaux services de renseignement français ont partagé leurs inquiétudes concernant la montée en puissance des groupes terroristes, non seulement au Sahel, mais également en Corne de l’Afrique et en Afrique australe.

Cette préoccupation émerge dans un contexte mondial où la menace terroriste semble se diversifier et se renforcer, nécessitant une attention soutenue et une coordination internationale accrue pour y faire face.
Depuis l’attentat tragique survenu à Moscou le 22 mars 2024, les projecteurs médiatiques se sont tournés vers des zones telles que l’État Islamique-Khorasan en Afghanistan, ainsi que vers le djihadisme russophone présent en Asie centrale et au Caucase.

Pour autant, ces foyers d’activité terroriste ne représentent qu’une partie du tableau complexe qui se dessine à l’échelle mondiale. Les groupes terroristes, loin de se limiter à des frontières géographiques spécifiques, élargissent leur champ d’action et s’adaptent aux évolutions politiques et sécuritaires dans différentes régions.

La réunion du 20 décembre 2024, tenue à huis clos, a permis aux services de renseignement français de présenter une analyse approfondie des risques et menaces sécuritaires en Afrique et au-delà. Bien que le terrorisme ait été le sujet principal, les discussions ont également abordé d’autres problématiques telles que les instabilités politiques et les interférences étrangères, soulignant ainsi la complexité des enjeux sécuritaires dans ces régions.

La collaboration entre les différents services de renseignement – la direction du renseignement militaire, la sécurité extérieure et la sécurité intérieure – a permis d’obtenir une vision complète de la situation, en intégrant des perspectives militaires, diplomatiques et intérieures. Cette approche holistique est essentielle pour comprendre la nature multidimensionnelle de la menace terroriste et élaborer des stratégies efficaces de prévention et de lutte contre le terrorisme.

En ce qui concerne l’évolution du terrorisme en Afrique, les services de renseignement soulignent plusieurs tendances préoccupantes. Tout d’abord, les groupes terroristes islamistes, tels qu’al-Qaida et l’État islamique, continuent de prospérer sur le continent, exploitant les failles des États fragiles et des institutions politiques instables. Ils déploient des tactiques sophistiquées pour étendre leur influence et recruter de nouveaux membres, alimentant ainsi un cycle de violence et d’instabilité.

La géographie du djihadisme en Afrique évolue également, avec des groupes opérant dans des zones autrefois considérées comme relativement stables. Les récentes activités terroristes au Mozambique, en République démocratique du Congo et en Somalie témoignent de cette expansion géographique, mettant en évidence la nécessité d’une réponse régionale et internationale coordonnée pour contrer cette menace.

Par ailleurs, le retrait progressif des troupes françaises de certaines régions du Sahel a créé un vide sécuritaire, permettant aux groupes terroristes de consolider leur présence et de mener des attaques plus audacieuses contre les populations locales et les forces de sécurité. Cette situation soulève des questions cruciales concernant la stratégie de contre-terrorisme de la France et la manière de maintenir la pression sur les groupes terroristes tout en assurant la stabilité régionale.

Si la France doit affronter son plus grand danger en Afrique, la DGSI surveille attentivement « cinq facteurs susceptibles d’avoir des conséquences à moyen terme sur le territoire national ».

En premier lieu : une propagande active. Il est à noter que, bien que les récents événements n’aient pas été qualifiés d’actes terroristes et semblent davantage relever du nationalisme et du panafricanisme que de l’islamisme, l’attaque perpétrée par un Malien à Paris le 3 février 2024 illustre l’impact de la propagande antifrançaise sur des individus isolés.

D’autres facteurs inquiétants évoqués par la DGSI en décembre 2023 comprennent des succès tactiques qui renforcent le prestige et l’attraction des groupes terroristes, le risque de départ de combattants francophones, notamment maghrébins, en contact avec des sympathisants ou des aspirants en France, ainsi que les conquêtes territoriales qui, à l’image de ce qui s’est produit dans la zone syro-irakienne, pourraient servir de base pour des opérations extérieures.

Le cinquième et dernier facteur concerne le risque que des combattants se fondent dans les flux migratoires et pénètrent sur le territoire national avec l’intention de commettre un acte terroriste, ou que des individus radicalisés ou d’anciens combattants migrent vers l’Europe pour des raisons économiques mais présentent un profil à risque en raison de leur passé.

A ce titre, on soulignera volontiers révèle la DGSI « que trois projets de rejoindre une organisation terroriste africaine ont été détectés et déjoués. On est très loin des 1 400 individus qui avaient rejoint l’État islamique sur le théâtre syro-irakien, mais ce phénomène était inexistant il y a peu».

Cela justifie la mise en place de mesures de criblage très strictes aux frontières et d’interdictions d’accès, en collaboration avec l’ensemble des services concernés. Bien que, pour l’instant, les groupes djihadistes africains « n’aient ni l’intention ni la capacité de projeter une menace [vers la France] », une chose est claire : la montée en puissance de l’Afrique dans le contexte du djihadisme mondial n’est pas une perspective réjouissante pour la France et pour l’Europe.

Il est clair que la montée en puissance du terrorisme en Afrique constitue un défi majeur pour la France et la communauté internationale dans son ensemble. Il est impératif de renforcer la coopération entre les différents acteurs, y compris les gouvernements africains, pour développer des stratégies efficaces de lutte contre le terrorisme et promouvoir la paix et la stabilité dans la région.

Olivier d’Auzon

Mots clés :#Sahel | #Wagner | france | terrorisme
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